Lorsque le bien-être n'est qu'une posture il devient une imposture.
- Eric PIERRE
- 17 juin 2022
- 2 min de lecture
Dernière mise à jour : 26 juin 2022
Notre aptitude au bonheur est un savant cocktail neurochimique qui semble indépendant de tout raisonnement et de toute volonté.
« Tous les êtres sont malheureux mais combien le savent ». Pour Cioran le malheur était une fatalité consubstantielle à la vie. Une fatalité qu’il fallait apprendre à aimer car elle était le prix de la liberté. On voudrait théoriser mais pouvons-nous réellement établir un lien entre la lucidité de Cioran et ses fascinations morbides ? « Je me suis toujours énormément ennuyé. Dès l'âge de 5 ans je me souviens de certains après-midis où je me jetais par terre sous le coup d'un vide intolérable. » confessait-il.

La lucidité n'entraîne ni désir de mort, ni désir de vie. Ces désirs sont d'une autre nature. Ils ne jaillissent pas de la pensée. Ils jaillissent des tempéraments. Et les tempéraments sont un mystère qui se révèle souvent dès les premiers âges de la vie. Il y a ceux qui, comme le réalisateur Claude Lellouche ou l’écrivain Jean d’Ormesson, nous expliquent pourquoi la vie est pleine de promesses. Et puis, il y a ceux comme Emil Cioran ou Michel Houellebecq, qui la décrivent comme un tunnel sans lumière.
Réservoir de promesses ou tunnel sans lumière ? Notre vision de la vie dépendra toujours de deux choses : l'objectivité des événements traversés (heureux ou malheureux) et la subjectivité de leur perception. Il existe probablement autant de raisons valables d’aimer la vie que de rejoindre Cioran ou Houellebecq dans leur désespoir. Pourrait-il exister meilleur remède contre le mal de vivre qu'une injection de sérotonine ?
« En analysant des données génétiques de 298.000 personnes, une équipe de chercheurs assure avoir identifié le gène du bonheur. Cette découverte contribuera peut-être à faire évoluer les traitements contre la dépression. »[1]
« La lucidité ne mène à rien » constatait amèrement Michel Houellebecq. « Elle est impuissante face à la dépression ».[2] Et il avait probablement raison. Face aux hormones et à la génétique, la lucidité ne peut sans doute pas grand-chose. Notre aptitude au bonheur est un savant cocktail neurochimique qui semble indépendant de tout raisonnement et de toute volonté.
Le sourire grimaçant de certains adeptes de la pensée positive et de certains acteurs du développement personnel nous laisse parfois penser que lorsque le bien-être n'est qu'une posture il devient une imposture.
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