Le choix et les préférences
- Eric PIERRE
- 10 juil. 2022
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 15 juil. 2022
On ne choisit pas ses appétits. Devenons chèvre et soudain un buisson de ronces prendra les allures d'un festin.
Pour illustrer la question du choix et des préférences, prenons le cas emblématique de l’homosexualité. On s'indigne et on reproche parfois leur choix et leurs préférences aux homosexuels ? Mais de quel choix parlons-nous ? Quelle idée plus saugrenue que de vouloir s’accoupler et quelle idée plus saugrenue encore que de vouloir s’accoupler avec un individu du même sexe ? Dans quel esprit farfelu pourrait naître ce projet loufoque de venir nous emboiter les uns dans les autres si ce n’est par l’effet de notre constitution biologique ?

Dans un monde de raison, sans pulsion, sans instinct et sans incitation biochimique, lequel d’entre-nous viendrait se dire, un beau matin : « Tiens ! Et si j’introduisais une partie de mon corps dans celui de mes congénères ? » ou encore « Tiens ! Et si je proposais à l’un de mes congénères d’introduire une partie de son corps à l’intérieur du mien ? Ce pourrait-être agréable et divertissant.».
Comme tous nos besoins, comme toutes nos envies, le désir sexuel est un élan du corps, pas un produit de la raison. Devenons chèvre et soudain un buisson de ronces prendra les allures d'un festin. On ne choisit pas ses appétits. On les constate et on s'y soumet. On pourra y résister bien sûr. Mais qu'est-ce que résister à une envie ou à un désir sinon agir sous l'influence d'envies ou de désirs contraires, qu’on n’a pas choisi non plus ?
Les betteraves et les lavabos
Nous pourrions désirer une betterave ou un lavabo si, parmi ses fantaisies, la nature nous le commandait. Et j’espère que les homosexuels n’iront pas s’imaginer que je compare leurs partenaires à des betteraves ou à des lavabos. J’espère également qu’ils comprendront que cette affirmation vaut de la même manière pour chacun d'entre nous.
« Lorsque j'ai découvert mon homosexualité j'étais très en colère contre moi-même. Moi qui, dès le plus jeune âge, avait toujours rêvé de fonder une famille et d'avoir des enfants, j'allais devoir vivre avec cette sexualité que je n'avais pas choisi » témoignait le comédien, le metteur en scène et l'humoriste Jarry, quelques larmes dans les yeux.[6]
Vivre librement sa sexualité est une chose mais choisir librement sa sexualité en est une autre. On ne choisit pas ses préférences. En matière de sexualité comme en tout autre domaine, impossible d’éprouver un désir, un besoin ou une envie qui ne serait pas voulu, ou pour le moins permis, par la nature. Les forces qui animent notre sexualité ne sont probablement pas différentes de celles qui animent le reste de nos motivations et des motivations du vivant.
Un festival d'acrobaties
Comment expliquer l’immense succès des images à caractère pornographique diffusées sur Internet ? Quelle en est la cause ? Qui pousse la moitié de l'humanité – dont, paraît-il, 30 % de femmes – à aller voir cette multitude de corps nus et ce festival d'acrobaties en tout genre, si ce n'est ce désir d'accouplement surgit du fond des âges ? On nous parle parfois de perversion ou de maladie, mais qu'est-ce que le succès de la pornographie si ce n'est cette manifestation supplémentaire de notre soumission à l'ordre des choses ? Cette soumission qui nous entraine massivement et inexorablement vers la reproduction ?
Certes, seule une infime minorité de nos rapports sexuels seront motivés par la volonté de procréer, certes on pourra mettre de la délicatesse, de l'amour et de la spiritualité dans la communion des corps, mais qu'est-ce que cela change ? Comment le désir pourrait-il naître de raisons rationnelles ?
Nous nous accouplons parce que telle est la volonté, ou la logique, du système. Nous nous croyons coupables de nos obsessions sexuelles mais la sexualité est d'abord une obsession de la nature. Sans elle, aucune vie ni aucune évolution possible. Quoi qu'il en coûte. La nature semble peu soucieuse du sort des individus.
Ce qu'on désigne sous le nom de "choix" n'est probablement rien d'autre qu'un ensemble d'injonctions biochimiques, car il n'existe aucune raison rationnelle d’agir, aucune raison de rationnelle de préférer un buisson de ronces à une fraise des bois.
_________________________________
Vous voulez réagir à cet article ? Laissez votre commentaire
Vous voulez rester en contact ? Suivez-moi sur Facebook
Vous voulez recevoir la newsletter mensuelle ? Je m'abonne
[1] « Les progrès de l'éthologie nous permettent de constater, chaque jour davantage, que l'homosexualité est courante dans le monde animal. Au moins 450 espèces sont concernées. » www.linternaute.com/actualite/societe/1040073-l-homosexualite-est-parfaitement-naturelle-450-especes-animales-concernees [2] Entendu dans l'émission « Les chemins de la philosophie » animée par Adèle Van Reeth et diffusée le 9 février 2021. [3] Cf. www.planeteanimal.com/quels-sont-les-animaux-hermaphrodites-2229.html [4] Entendu dans l'émission "l'Odyssée pour la vie" diffusée sur France 5 le 12 avril 2022 [5] Entendu dans l'émission l'abominable mystère des fleurs diffusé sur France 5 le 19 mai 2022. [6] Entendu dans l'émission "C'est à vous" animée par Anne-Élisabeth Lemoine et diffusée le 3 février 2022 sur France 5.
Comments